Gambaderies champignonesques
C'est avec beaucoup de bonheur et d'émotion que je partage avec vous les mots d'un ami cher, un poète disparu qui savait entrelacer les mots et les images avec intelligence et délicatesse... Son chien Flip l'accompagnait dans ses promenades, et inspirait aussi sa plume...
Ce matin, Flip et moi, avons été visiter notre forêt
Et tandis que l’un gambadait sous les fourrés
L’autre, lequel ? devinez…
Voici ses « gambaderies »
Ce matin, la forêt pleure
Elle a perdu son soleil…
Elle pleure de toutes ses feuilles
La mousse, lasse d’éponger tant de larmes
Les laisse s’écouler sur les sentiers en une infinité de ruisselets
La terre se souvient du chaud soleil, et savez-vous ce qu’elle fait ?
Unissant en son cœur, sa chaleur au chagrin des grandes futaies
Elle fait naître aux bords des chemins
Dans les prairies, et sous les buis
Des parapluies !
Parapluies dérisoires qui ne durent que deux soirs
Interrogés par Flip, voici ce qu’ils ont dit
« Je suis un cèpe, je suis bien né »
Ayant regardé, j’ai vu que son pied était tout enflé…
Un autre lui a dit
« Je suis un lactaire, lactaire délicieux
Et si ma corolle est colorée, c’est que cette nuit
On y a fait brûler la flamme olympique »
Sur un talus, plus loin
Nous avons vu tout un pensionnat de Demoiselles
Raides comme des chandelles hautaines
Elles tardaient à déployer leurs larges chapeaux de soleil
Un bracelet à leur pied voulait dire
« Voyez, je suis la plus belle, je suis Coulemelle ».
D’autres, pâles, jaunes et frileux
Peut-être même vénéneux, se serraient en bouquets
Poltrons, ils n’osaient avouer leur nom
Mais Flip m’a dit
« Ce sont des… champignons… »
Jean Comtesse